Changement de vision du monde lors d’un nouveau palier de conscience par Pierre Cousineau et Sophie Côté.
Je vais me servir de la lecture de deux livres et deux auteurs qui sont « La reconsolidation thérapeutique de la mémoire. Transformer les schémas émotionnels avec la thérapie de la cohérence » et « Pratiquer la thérapie des schémas. Transformer les modèles prédictifs avec la reconsolidation de la mémoire. » De Sophie Côté et Pierre Cousineau, deux psychologues Québécois qui se servent des avancées des neurosciences pour évaluer et adapter leurs pratiques en psychothérapie. Ces deux livres vont éclairer la manière dont le cerveau se comporte lors d’une nouvelle prise de conscience qui entraine une nouvelle vision du monde.
La progression des neurosciences au cours des dernières décennies a permis de faire un pont entre ce que les psychologues cliniciens observent dans leurs pratiques quotidiennes et ce que les scientifiques découvrent sur le fonctionnement neuropsychologique et somatique. Depuis plusieurs années les psychologues pensent que le la clé réside dans la compréhension du fonctionnement de la mémoire et des façons d’intervenir sur elle .
La mémoire au service de la préservation de la vie pour Antonio Damasio.
La fonction mémoire remonte aux origines de la vie. Elle est tributaire de ce qui est transmis biologiquement aux organismes ainsi que leurs expériences de vie. Elle est au service de ce qui est essentiel au maintien de la vie et à son amélioration et assure une homéostasie, un état de cohérence biologique de son milieu interne dans un milieu externe qui lui impose, par ailleurs, ses conditions.
C’est ce qu’affirmait déjà le neuroscientifique Antonio Damasio, il y a plusieurs années, en mettant particulièrement en lumière la fonction des émotions dans notre fonctionnement et dans l’adaptation à notre milieu de vie.
L’évolution à patiemment permis à certains organismes vivants d’atteindre une prodigieuse complexité organisationnelle, notamment en parvenant à la représentation du monde. Notre capacité à nous représenter le monde, tant extérieur qu’intérieur, puis à le simuler, à associer que ceci vient avec cela, à prédire ce qui va arriver et à se préparer à répondre, est-ce qu’il va définir les fonctions fondamentales de notre mémoire. Pour elle, passé, présent et futur sont intimement liés pour dresser une cartographie du monde. Nous avons recours à des caractéristiques mnésiques décrites par des termes comme modèles mentaux, schémas, constructions mentales, concepts, construits… Ces termes renvoient à quelque chose s’étant justement construit dans l’interaction entre notre héritage génétique et nos expériences de vie.
Le cerveau détecte les incohérences et modifie nos schémas mentaux pour Léon Festinger.
La recherche fondamentale et l’expérience clinique confirment qu’il est possible de modifier les schémas mentaux. Et le concept, issu des neurosciences, qui permet d’affirmer qu’il est possible de changer un schéma mental, est celui de la reconsolidation de la mémoire, notamment à partir du fait important que, notre cerveau, lorsqu’il est conscient des informations qu’il traite, tolère très difficilement les incohérences. Ce que le psychosociologue américain Léon Festinger nommait la réduction de la dissonance cognitive.
Nous verrons à un autre moment , à travers les ouvrages d’un autre neuroscientifique, Sébastien Bohler, comment et pourquoi notre cerveau est devenu un détecteur d’incohérence et de chercheur de sens.
Le cerveau produit des prédictions tandis que le mode est la réponse mobilisée par l’organisme. Cette réponse se situe à plusieurs niveaux physiologique : affectif moteur, verbal…
Transfert de données et difficile mise à jour:
Concernant notre fonctionnement, s’il nécessitait toujours un traitement explicite de l’information nous n’y arriverions pas car notre espace est limité pour l’attention consciente ou la mémoire de travail, qui seraient continuellement surchargées. C’est pourquoi une fois retenues et maîtrisés, plusieurs données sont transférées en mémoire implicite : c’est le propre de la majorité de nos construits, schémas et modèles mentaux, Mais ce qui libère de l’espace de traitement des données, limite en même temps la possibilité de mise à jour, puisque tout s’y fait de façon automatique, en dehors de tout traitement explicite.
Modèles mentaux pour savoir anticiper l’action:
Notre cerveau accumule des souvenirs épisodiques et cherche à en extraire des caractéristiques communes, des patrons pouvant être généralisés, des significations. Il peut aussi créer des modèles à partir d’un seul ou de peu d’événements, surtout si l’objectif de création de ces modèles mentaux est de faire des prédictions dans des situations présentant des propriétés similaires au prototype créé et d’être ainsi mieux préparé à réagir. Cette construction à partir d’expérience constitue « la mémoire sémantique implicite », elle renvoie à des généralisations sur le fonctionnement de soi, des autres et du monde. Elles sont le plus souvent apprises par simple association, qualifiée « d’apprentissage statistique ». Les mémoires sémantiques sont acquises dans un contexte, puis généralisées à d’autres contextes. Il est fréquent que ce soit de notre milieu familial d’origine mais les modèles mentaux peuvent être créés à tout moment de notre vie et transformés, également, à tout moment de notre vie.
Nous ne changeons pas le passé mais sa signification.
Nous ne pouvons pas modifier ce qui nous est arrivé, par contre, la signification qui a été donnée à ces événements et les généralisations qui en ont découlé étaient tributaires des facteurs contextuels de son apprentissage .
Le fait de pouvoir modifier la signification de ce qui nous est arrivé me paraît particulièrement important concernant la découverte du lien de paternité.
En raison de sa fonction adaptative lors de sa création, la mémoire sémantique a tendance à se maintenir malgré les changements de contextes faisant que l’on peut perpétuer un modèle, qui était fonctionnel au départ, mais qui ne l’est plus aujourd’hui.
Nos ancêtres, lorsqu’ils ont du faire face à ce changement de représentation de leur monde, n’ont évidemment pas compris ce qui leur arrivait. Darwin et son concept de sélection sexuelle n’étant pas encore passé par là. Ils se sont organisés au mieux de leurs connaissances et de leurs ressources du moment. Le fait d’en prendre conscience aujourd’hui, doit permettre à nos cerveaux de détecter l’incohérence de l’organisation hypertélique de notre société au moment ou nous avons un besoin vital de sobriété.
Ces construits sont pourtant, en général, bénéfiques : ils permettent de progresser, de s’adapter, d’apprendre. Toutefois d’autres expériences laissent de fortes impressions qui deviennent une barrière. De plus, ces apprentissages, tant qu’ils ne rencontrent pas les conditions nécessaires à leur changement, perdureront sous leur forme originale, parfois pour le reste de la vie et je pense qu’ils sont transmis de générations en générations, tant qu’ils ne sont pas disqualifiés par de nouvelles façons d’envisager le monde. La fonction physiologique principale de la mémoire est en effet de faire un rappel de l’information pertinente qui est stockée afin d’aiguiller l’adaptation .
Changeons notre représentation du monde pour lui redonner du sens: modification du contenu de notre mémoire implicite.
L’apprentissage cible est bien évidemment au centre du dés-apprentissage, il est constitué d’une forme de prédiction au sujet de soi-même, des autres ou du monde et constitue un modèle de la réalité. En étant en contact avec l’environnement interne et externe, le cerveau va constamment chercher à donner un sens à ce qu’il perçoit. Il est nécessaire que le cerveau élabore ces constructions sinon le processus de perception restera beaucoup trop laborieux pour être viable, car nous devrions chaque fois passer en revue nos innombrables expériences antérieures. Le cerveau crée donc des étiquettes- concepts où catégories qui servent à donner un sens au monde qui nous entoure et qui est en nous : c’est la mémoire sémantique implicite.
Dans cette mémoire implicite sémantique, le cerveau construit des concepts pour former rapidement et efficacement des perceptions de la réalité, sur la base d’expériences passées similaires de ce qui a été déterminé comme statistiquement plus probable et il se fie à ces perceptions pour administrer son budget de ressources, afin de conserver au maximum son homéostasie.
Notre mémoire sémantique construit notre réalité:
Les simulations que nous créons dans notre esprit nous paraissent donc plus réelles que le monde physique qui nous entoure. Nous ne réagissons pas au monde, nous construisons notre réalité et nous la simulons sur la base de ces constructions et, lorsque ces perceptions ne correspondent pas à la réalité, le cerveau peut aller jusqu’à ignorer cette anomalie et conserver sa prédiction d’origine : il se retrouvera ainsi enfermé dans la réalité qu’il s’est créée. Ce mécanisme semble aussi fonctionner pour les constructions collectives: même si nous constatons des dysfonctionnements majeurs de modèles économiques ou politiques, nous persistons dans des systèmes parfois délétères.
Redonner du sens au péché originel pour retrouver l’intelligence des limites.
Le péché originel n’est toujours pas expliqué rationnellement. Il a vu son contenu et son origine se perdre dans le temps. Il est donc devenu inconscient. L’explication de cet événement, la faute imputée à la femme est faux. Cette absence d’explication pertinente de ce contenu, cependant présent à notre inconscient, le conserve toujours agissant. Il ne nous permet pas de trouver un mode collectif d’adaptation efficace. L’organisation de la société, décalée par rapport à notre fonctionnement psychique produit de l’égoïsme, facteur d’inégalité, inégalité vécue comme une injustice. Ce sentiment d’injustice entraîne frustration et anxiété, facteurs susceptibles de déclencher de la violence, violence au danger croissant à mesure que se développe les moyens techniques de nous anéantir.
Nous sommes dépourvus d’intelligence des limites et notre lien à la réalité est altéré. Les prémisses de notre pensée et les soubassements de notre construction du monde sont donc incohérentes. L’organisation du monde que nous avons mis en place, produite par une vision fausse de ce que nous sommes nous conduit, du fait de déséquilibres incontrôlables générés, à la reproduction d’un épisode destructeur.
Concernant le fonctionnement de notre cerveau, il faudra lui faire vivre une expérience assez forte pour briser l’illusion de la réalité construite, lui donnant une preuve de cette illusion, ce qui déclenchera sa mise à jour et permettra de trouver une organisation de la société rationnellement adapté à notre environnement actuel.


Changer de schémas mentaux pour éviter l’impasse climatique.
Transformer notre représentation du passé pour changer l’avenir.
lecture de la fiction préhistorique!
Une découverte a bouleversé la société.La faute est toujours imputée à Eve. Pourtant le seul coupable est l’évolution. Quels en sont les ressorts?
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